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La répression allemande et vichyste contre la Résistance
La répression allemande et vichyste contre la Résistance
En zone occupée, Hitler confie les rênes de la répression à l’armée allemande, la Wehrmacht. Le Militärbefehlshaber in Frankreich (Commandant militaire en France, MBF) met en place des mesures répressives pour « maintenir l’ordre » et punir ceux qui menacent la sécurité des troupes d’occupation.
Les tribunaux militaires allemands
En application du code pénal allemand désormais en vigueur en zone occupée, le Commandant militaire en France (Militärbefehlshaber in Frankreich, MBF) instaure une répression judiciaire : arrestations, inculpations, procès et condamnations. Les personnes suspectées d’actes hostiles envers l’occupant sont jugées par des tribunaux militaires allemands présents dans chaque département de la zone occupée. Elles encourent amendes, peines d’emprisonnement, de travaux forcés ou la peine de mort.
Dès juin 1940, signe d’une répression se voulant d’emblée sévère, les avis d’exécution de personnes reconnues coupables de sabotages (de coupures de câbles téléphoniques notamment) ou d’agressions de soldats sont placardés dans les rues.
À partir de début 1941, ceux qui tentent de rejoindre les Forces Françaises Libres (FFL) du général de Gaulle à Londres et les membres des premiers groupes de résistance démantelés sont également traduits devant ces tribunaux militaires. À la fin du mois de juillet 1941, plus de 160 peines de mort ont été prononcées et un quart exécuté.
Les mesures de représailles administratives
Parallèlement à cette politique judiciaire, dès septembre 1940, le MBF met en places d’autres mesures répressives pour sanctionner des actes graves et dissuader la population de toute action contre les forces d’occupation. Il décide « d’internements administratifs », c’est-à-dire sans jugement et sans limite de temps, contre des personnes considérées comme dangereuses. Le MBF recourt aussi à des représailles collectives lorsqu’il n’arrive pas à retrouver les responsables : élargissement du couvre-feu, sanctions financières, désignations d’otages parmi les notables. Celles-ci ne sont pas encore suivies d’exécutions.
Avec le développement des réseaux et des mouvements de la Résistance française et la stratégie de lutte armée adoptée par le parti communiste clandestin après l’invasion de l’URSS le 22 juin 1941, les autorités allemandes durcissent la répression.
La lutte contre les « actions terroristes »
Le 21 août 1941, au métro Barbès à Paris, un commando de jeunes communistes abat un aspirant de marine allemand. Les autorités du MBF réagissent en renforçant leur politique répressive. Toutes les personnes détenues par ou pour le compte des autorités allemandes, dans les prisons et les camps, sont considérées comme des otages susceptibles d’être fusillés en représailles aux attentats. Vichy crée ses propres juridictions d’exception, les sections spéciales, pour juger les communistes. Le MBF fait pression pour que ces derniers soient rapidement condamnés à mort. Le 27 août, 3 membres du PCF clandestin sont jugés et guillotinés le lendemain à la prison de la Santé. Le 6 septembre, après un nouvel attentat, le MBF fait fusiller les 3 premiers otages. Dès lors, les exécutions se succèdent de semaine en semaine au Mont-Valérien en région parisienne.
Le « Code des otages »
Trouvant cette politique répressive insuffisante, Hitler fait promulguer le 16 septembre 1941 un décret portant sur les « mouvements séditieux communistes dans les territoires occupés ». Il ordonne que 50 à 100 communistes soient systématiquement exécutés pour la mort d’un soldat allemand. Le 28 septembre, le MBF édicte une ordonnance connue sous le nom de « Code des otages ». Le code est appliqué après que des résistants communistes ont abattu le Feldkommandant de Nantes et un conseiller d’administration militaire de Bordeaux les 20 et 21 octobre 1941. Quarante-huit otages à Châteaubriant, Nantes et au Mont-Valérien, puis 50 autres à Souge, près de Bordeaux, sont fusillés. Pour les premiers, Vichy participe activement en proposant des listes de personnes à exécuter choisies parmi les militants communistes internés.
Un coupable désigné : le « judéo-bolchévique »
Le 15 décembre 1941, en représailles à la mort de 4 soldats, le MBF fait fusiller 95 otages au Mont-Valérien et en province ; parmi eux 53 Juifs. La répression allemande qui visait principalement les communistes, s’en prend désormais aussi explicitement aux Juifs, complétant la définition idéologique des responsables des attentats : les « judéo-bolcheviques ». Pour renforcer cette politique, le MBF annonce que des otages juifs et communistes seront déportés en représailles « vers l'Est ».
Alors que l’organisation de la Solution finale s’est accélérée le 20 janvier 1942 lors de la conférence de Wannsee en Allemagne, militaires, diplomates et SS s’entendent pour persécuter les Juifs en France occupée.
La poursuite des mesures judiciaires
Cette « politique des otages » s’ajoute aux mesures judiciaires précédemment mises en place. Les tribunaux militaires multiplient les jugements : jusqu’au mois de mai 1942, près de 500 condamnations à mort sont prononcées et les trois quarts sont exécutées. Les peines de réclusion ne se purgent plus systématiquement en France occupée, mais commencent à être régulièrement suivies de déportation dans des prisons allemandes. Certains procès menés par le MBF contre de jeunes francs-tireurs font l’objet d’une active propagande et la presse est invitée à dénoncer les « crimes des terroristes ».
Hitler considère cependant que les tribunaux militaires ne prononcent pas suffisamment de peines de mort et ordonne la mise en place, le 7 décembre 1941, de la procédure « Nacht und Nebel » (« Nuit et Brouillard », NN). Les juges militaires doivent alors condamner à mort dans les plus brefs délais. À défaut, ils se dessaisissent des dossiers au profit d’une juridiction en Allemagne. Les prévenus sont déportés avant jugement et dans le plus grand secret, laissant leurs familles sans nouvelles.
En janvier 1942, le MBF remet en cause les exécutions massives d’otages qui ont des répercussions politiques négatives et qui pourraient être évitées en renforçant les enquêtes de police. Il préconise en revanche la déportation des communistes et des Juifs. Hitler décide alors de confier la politique de répression en France occupée à un représentant spécial d’Himmler, chef des SS et de la police du Reich.
Le 1er juin 1942 le général SS Karl Oberg est nommé « Chef suprême de la SS et de la police en France ». Il prend la relève de la politique de répression en France occupée et poursuit la stratégie du MBF jusqu'à l'automne 1942, date à laquelle la politique des otages est abandonnée. La SS développe ensuite ses propres mesures répressives, alors même que les tribunaux militaires continuent à sévir.
Intensification de la répression
Les SS héritent de l’application de la politique des otages. Ils la poursuivent, mais décident de regrouper les exécutions, dès lors massives, pour en accentuer l’effet dissuasif auprès de la population et pour laisser le temps aux policiers de rechercher les coupables. Le régime de Vichy collabore de plus en plus étroitement avec les autorités allemandes. Les accords entre René Bousquet, secrétaire général de la police de Vichy, et le général Oberg au mois d’août 1942, assurent le travail commun de la police française et des forces d’occupation.
Le 10 juillet, les SS étendent la définition de l’otage aux membres des familles des résistants recherchés. En représailles aux attentats commis depuis plusieurs semaines, 88 otages sont fusillés au Mont-Valérien le 11 août 1942, puis 116 le 21 septembre. Cette dernière exécution d’otages est la plus importante de toute l’Occupation.
Les SS assurent également la déportation de représailles, prévue par le MBF depuis décembre 1941, de près de 1 200 otages communistes vers Auschwitz le 6 juillet 1942. Après avoir fait partir les 5 premiers convois de Juifs, les SS organisent les transports désormais réguliers de déportés dans le cadre dela Solution finale.
La fin de la politique des otages
Néanmoins les attentats se poursuivent et les exécutions massives sont désapprouvées par l’opinion publique. Les autorités allemandes sont soucieuses de ne pas gêner le recrutement de la main-d’œuvre française pour le travail en Allemagne. Constatant l’échec de cette politique, les SS décident de mettre fin aux exécutions d'otages à la mi-octobre 1942.
À titre exceptionnel, 50 derniers otages sont fusillés au Mont-Valérien le 2 octobre 1943, à la suite d’un attentat commis à Paris contre Julius Ritter, responsable allemand chargé de la réquisition des travailleurs français au profit du Reich.
Les déportations et les condamnations à mort
En octobre 1942, les SS introduisent en France une nouvelle forme de répression : la procédure de détention de sécurité (Schutzhaft) qui leur permet de déporter en Allemagne, sans jugement, toute personne suspecte ou coupable d’agissements anti-allemands. De janvier 1943 à août 1944, près de 40 000 personnes sont ainsi déportées depuis les camps de Compiègne et de Romainville vers les camps de concentration nazis.
Après l’occupation de la zone sud en novembre 1942 et face à la multiplication des actions de la Résistance, les tribunaux militaires intensifient leur répression en condamnant de plus en plus à la peine capitale : de janvier 1943 à août 1944, plus de 1 700 personnes sont fusillées.
La lutte contre les « bandes armées »
À la fin de l’année 1943, dans la perspective du débarquement allié et craignant l’ouverture d’un second front derrière leurs troupes à partir des maquis, les autorités allemandes radicalisent leur politique. Désormais, ils adoptent une stratégie de guerre contre la Résistance et la répression touche l'ensemble de la population. Aux déportations massives s’ajoutent des jugements expéditifs et des « opérations de nettoyage » menées par les militaires et les policiers contre les maquis et les zones réputées « infestées par les bandes terroristes ». Ces expéditions s’accompagnent d’exactions nombreuses contre les populations civiles.
Les massacres et les exécutions sommaires
À l'été 1944, alors même que les condamnations à mort prononcées par les tribunaux militaires atteignent leur apogée, et confrontées à la progression des troupes alliées, les forces d’occupation ne prennent plus le temps de juger systématiquement les résistants. Elles procèdent à de nombreuses exécutions sommaires, à Romainville, à Vincennes… et commettent des massacres, comme dans les villages d’Oradour-sur-Glane ou Maillé. La retraite allemande laisse dans son sillage des milliers de victimes.